Toutes les conditions semblaient réunies pour que la COP26 débouche sur un « new-deal » mondial permettant de limiter le réchauffement de la planète à un niveau proche de 1,5°C : le retour des États-Unis parmi les signataires du traité de 2016 en début d’année ; puis une succession de forts focus internationaux sur les enjeux climatiques à partir de l’été ( présentation du Paquet « Fit for 55 » de l’UE, synthèse préalable au 6ème rapport du GIEC, déclaration finale du sommet de Rome du G20).
Rassemblant 40 000 personnes accréditées, annoncée comme «dernier espoir de limiter le réchauffement à +1,5°C » par son Président, la COP de Glasgow a ainsi catalysé des attentes très importantes. Un enthousiasme qui s’est amenuisé au fil des jours. Jusqu’à susciter la publication d’une lettre ouverte de 200 climatologues dénonçant sa trajectoire le 11 novembre ; et un exode de délégués se joignant aux manifestations de rues le lendemain.
Au centre des déceptions et de la confusion qui a présidé à ses dernières heures : un bras de fer financier entre pays les plus affectés par le réchauffement climatique et puissances industrielles, des engagements considérés comme insuffisants car non contraignants, l’annonce d’horizons de neutralité carbone postérieurs à 2050 par plusieurs gros émetteurs.
Ces épisodes laisseront certainement une sensation d’inachevé et de bilan mitigé. Certes les officiels et les pragmatiques en retiennent la confirmation des objectifs et trajectoires de l’accord de Paris.
Mais les sceptiques soulignent que l’avenir se dessine toujours bien au-dessus de 2°C, même en y intégrant les avancées de Glasgow. Pouvait-il vraiment en être autrement à l’issue d’un nouveau cycle de cinq ans de quasi inertie marqué par une pandémie mondiale ?
Principales thématiques et avancées de la COP26
Mécanisme d’équité et d’aide aux pays émergents impactés par le réchauffement climatique
La Déclaration de Rome du G20 avait réaffirmé, à la veille de la Conférence, l’engagement des pays concernés à mobiliser 100 milliards de dollars par an de 2020 à 2025 pour répondre aux besoins des pays en développement confrontés aux effets des changements climatiques. Le retour des États-Unis dans l’accord de Paris semblait garantir le rattrapage des 20 milliards manquants depuis la première échéance. C’est pourtant ce point qui a provoqué les principales crispations retardant l’adoption de la déclaration de clôture de la COP. Échaudés par une promesse partiellement tenue, une centaine de pays ont plaidé pour l’instauration d’un mécanisme plus robuste de « pertes et préjudices ». En redoutant de potentielles conséquences juridiques, les États-Unis et plusieurs de leurs partenaires s’y sont vigoureusement opposés.
Fin de la vente de voitures et utilitaires légers thermiques neufs
Plusieurs constructeurs majeurs, Pays, Autorités locales et propriétaires de flottes de mobilité ont annoncé fixer la fin de la vente de véhicules légers thermiques à 2035 sur les principaux marchés et 2040 dans le reste du monde. Contrairement au processus engagé par l’Union européenne, cette déclaration n’a toutefois pas de portée juridique contraignante.
Transition énergétique et recours au nucléaire
Face aux besoins croissants en électricité générés par la décarbonation (déplacements, chauffage des bâtiments), la question de l’énergie nucléaire a pour la première fois été abordée de façon dépassionnée dans une COP. Il a été question de gestion du risque, de substitution au charbon, de préservation du parc de réacteurs existant, d’une nouvelle génération de petites unités.
Réduction de l’usage du charbon
Bien qu’extrêmement polluant, le charbon représente toujours plus de 35% de la production mondiale d’électricité. Son abandon à moyen terme est indissociable de la tenue des objectifs climatiques. En première semaine de la COP26, une quarantaine de pays se sont engagés à le remplacer par des énergies propres d’ici 2030. Mais pour l’heure, les principaux producteurs et consommateurs de charbon (Chine, États-Unis, Australie, Inde…) ne se sont pas associés à cette déclaration. C’est d’ailleurs le terme « d’accélérer les efforts vers » la sortie du charbon qui s’est finalement imposé dans le texte de la déclaration de clôture.
Accord sur le méthane
Trente fois plus réchauffant que le C02, le méthane a aussi une durée de vie beaucoup plus courte dans l’atmosphère. Une réduction significative de ses émissions pourrait permettre de gagner quelques précieuses fractions de degrés aux stratégies de limitation du réchauffement climatique. Plus de cent pays ont signé à Glasgow un accord pour en réduire les émissions de 30% sur 10 ans. L’initiative se concentre sur les secteurs de l’énergie et des déchets, excluant à ce stade le champ de l’élevage qui pèse pourtant pour un quart des émissions.
Lutte contre la déforestation
C’était la première annonce concrète de la Conférence 2021 : la signature par plus de 100 pays abritant 85% des surfaces sylvestres mondiales d’un accord de préservation des forêts. S’appuyant sur 10 milliards de fonds publics internationaux, elle a indéniablement constitué un signal positif. L’enjeu est désormais de parvenir à doter ces engagements d’un cadre efficace de suivi : des objectifs similaires actés en 2014 sont restés lettres mortes. Ainsi en est-il du Brésil où les déforestations causées par des activités illégales et les incendies ne fléchissent pas depuis dix ans.
Le bilan de cette COP26 ne pourra finalement être tiré que dans un an, à l’épreuve des plans et calendriers que les pays produiront pour étayer leurs engagements. Un exercice indispensable pour restaurer la crédibilité des États auprès de leurs partenaires, des populations, des agents économiques et des ONG.
À ce jour, seul l’espace européen a su poser ces cadres et les conditions adéquates pour entrer dans le dur de l’accélération du rythme des transitions.
Olivier ABULI, consultant conseil et analyses